Le livre de Joan de Paul Thurin
Nous étions nombreuses à écouter le sourire aux lèvres les aventures romanesques et rocambolesque de Joan de Leeds racontées par Jeanine et Macau lors de l’animation du 11 mars à la bibliothèque. Mais ne nous y trompons pas : un fond historique était de mise car la jeune femme a réellement existé et Paul Thurin pour écrire Le livre de Joan, jeune moniale du 14ème siècle a analysé ce Moyen Age anglais qui sert de décor au roman.
Le récit s’inscrit dans le contexte de l’Angleterre du 14e siècle : politique d’abord quand le roi Edward II est confronté à la fronde des barons ; économique, social avec la Grande famine, les intempéries subies depuis 1315 ayant décimé le bétail et anéanti les récoltes et enfin religieux, le pouvoir religieux prévalant sur celui des hommes et de cette année 1318 où Joan de Leeds s’évade de l’abbaye de St Clément d'York. Paul Thurin va lui donner un visage et une voix mais personne ne sait ce que la vraie Joan est devenue.
L’auteur nous offre le portrait plein d’humour, attachant et multiple d’une Joan adulte : nonne imprévisible, courageuse, rebelle, respectée par les autres nonnes et les domestiques, redoutée par l’abbesse, prophétesse mais sans pouvoirs surnaturels, se contentant d’observer la nature et les gens, quasi christique lors de ses réunions secrètes dites « séances de la dernière chandelle », avide de connaissances et de liberté tant dans son interprétation des textes bibliques que dans la connaissance du monde.
Mais Joan est une religieuse éprise de liberté et les contraintes du couvent l'enferment, elle qui veut connaître tous les possibles comme le fit, au 12ème siècle en France, Héloïse un de ses modèles. Elle va donc s'évader et pour la guider dans ce monde qu'elle ne connaît qu'en théorie elle aura besoin de passeurs, de mains tendues pour découvrir ce que les Écritures lui avaient caché : le plaisir, la connaissance et autres raisons de s'émerveiller. Les deux premiers, Fergus et La Pourvoyeuse, ressemblent à ces personnages du Moyen Âge dont la difformité physique cache des trésors d'humanité ; Fergus petit bonhomme qui n'a qu'un bras l'aidera à atteindre Londres tout en veillant sur elle et La Pourvoyeuse, femme dont le corps et le visage peuvent faire peur mais au contraire vont apaiser Joan et l'aider, la protéger tout au long du roman, lui enseignera la science des herbes, des plantes médicinales qui peuvent soulager ou guérir. Cette connaissance lui ouvrira la porte des demeures aristocratiques. Mais le monde plein de richesses qu'elle veut connaître est aussi un monde masculin et l'amour humain va succéder à l'amour de Dieu qui était le seul envisageable dans les murs du couvent ! 3 hommes vont la guider dans ce chemin qu'elle jalonne de références religieuses en récitant des versets bibliques, de préférence issus de cet hymne à l'amour qu'est Le Cantique des Cantiques. John de Leeds son cousin sera un initiateur timide et mélancolique ; Edwin l'étudiant en médecine aux boucles flamboyantes lui fera découvrir le plaisir des sens, découverte que complétera Malcom de Neuville. Fis d'un famille influente de l'aristocratie il la présentera au roi et l'introduira dans des cercles, uniquement masculins, où elle dissertera brillamment sur les notions croisées de Dieu et de liberté.
Ayant présenté les extérieurs du livre sans trop toucher à son histoire et ses rebondissements, Jeanine et Macau après avoir allumé la curiosité de leurs auditeurs et espéré les inciter à lire le roman ont fini en lisant la dernière phrase du roman :
Alors écoute mon histoire Fergus elle en vaut la peine.